Production de plaquettes pour l’autonomie énergétique de la ferme

Posté le 20 novembre 2025 par Lene Kollmorgen | Actualité, Journées techniques

Le 20 octobre 2025, Agrof’île a organisé une matinée de démonstration dédiée à la production de plaquettes de bois destinées au chauffage agricole, sur l’exploitation de Luc Signolle, producteur de céréales et de légumes, à la Cueillette de Servigny à Lieusaint. Cette rencontre, financée par le programme Terre et Eau 2025 dans le but de sensibiliser les acteurs aux multiples rôles des haies dont l’amélioration de la qualité de l’eau et la production de biomasse. Les participants ont pu découvrir l’ensemble du processus : du broyage des branches par démonstration d’une déchiqueteuse jusqu’au fonctionnement de la chaudière à bois, en passant par le stockage et convoyage des plaquettes.

L’exploitation valorise des troncs, branches issus du défrichage et déchets de bois des espaces verts locaux. Le bois, toutes essences confondues (feuillus, résineux), sèche à l’air libre avant d’être broyé à l’automne pour produire des plaquettes, stockées en hangar. Le silo de la chaudière, en service depuis 15 ans, est rechargé toutes les trois semaines (~ 30 m3). Elle chauffe deux maisons d’habitation et un appartement, ainsi qu’un atelier plus ponctuellement soit environ 400 m2. Une chaudière fuel est reliée en parallèle sur le circuit et permet de prendre le relais en cas de défaut d’approvisionnement ou de maintenance. Cet exemple concret d’autonomie énergétique a permis d’échanger sur les avantages et limites du bois-énergie, ainsi que sur les enjeux pour les exploitations agricoles, les collectivités et communes rurales. Luc Signolle a répondu aux questions techniques sur son installation.

Quelques éléments de discussion : 

  • la qualité de l’air : le chauffage à bois est plus polluant (particules fines) que le chauffage au gaz ou au fuel, mais les autres énergies ont d’autres défauts tels que la pollution aux sites d’extraction, des impacts lors du transport, des enjeux géopolitiques importants, la délocalisation d’emplois, la volatilité des prix, la dépendance à d’autres pays… 
  • le coût de l’énergie : la journée de prestation de broyage revient à 2500€ HT à l’agriculteur pour la production d’environ 50 t de combustibles par an. Le bois est aujourd’hui apporté gratuitement par des acteurs du territoire. L’investissement initial est important, et il faut pouvoir stocker la matière (le volume massique est de 2,5 à 3 MAP/t). La plaquette est stockée sur la ferme, dans un silo horizontal, à côté des céréales, à distance du silo d’approvisionnement de la chaudière. Il faut compter environ 25% de volume mort dans un silo à dessileur rotatif en raison des coins inaccessibles aux pales et au volume sous le système, légèrement incliné.
  • Différents essais ont été menés par l’agriculteur pour diversifier le combustible : les issues de triage et céréales déclassées produisaient trop de mâchefer (composition chimique inadaptée à la température du foyer et donc fusion des cendres). 
  • Une chaudière, de la marque Reka, de 80 kW a été installée il y a 15 ans pour un investissement de 80 k Euros. Depuis, des progrès technologiques ont suivi et il doit exister des modèles avec une maintenance facilitée. En particulier pour éviter les problèmes de dégradation des caoutchoucs de l’écluse rotative, il existe maintenant des écluses qui coupent les sur-longueurs grâce à un système de couteaux et contre-couteaux. Ces dispositifs servent de sécurité anti-retour de feu et permettent de limiter les pannes / casses engendrées par les queues de broyage.
  • Le temps d’entretien et le décendrage tous les … ? et un nettoyage / ramonage 2 fois par saison. Le chauffage au bois nécessite plus d’interventions et de suivi que les autres modes de chauffage.
  • le propriétaire souligne l’importance de configurer une alarme qui avertit en cas d’arrêt de la chaudière (manque de combustible, panne) pour limiter le recours au secours

Démonstration de la déchiqueteuse, les plaquettes obtenues et la chaudière.

 

Dessin du principe de fonctionnement d’une chaudière bois à plaquettes (marque Hargassner)

La visite a inclus les haies près des parcelles en maraîchage : deux haies multi-stratifiées (entre 15-20 ans) à côté d’un ancien parking et une autre, derrière des tunnels. Toutes les deux servent à protéger des cultures du soleil et du vent et à favoriser les espèces auxiliaires. 

Un effet observé par l’agriculteur est que les légumes en tunnel sont plus poussantes à 20 m de la haie, il semblerait être lié possiblement à l’ombre de la haie. Les préconisations de gestion évoquées étaient un recépage à ras du sol tous les ans sur 30 m pour rajeunir la haie près des tunnels et couper les arbres à hauts jets (saules) sur l’autre haie. De manière générale, le recépage en plusieurs fois sur des portions de 30 m garantira une repousse vigoureuse tout en conservant un effet brise-vent global pour la haie. Les sujets bien individualisés au-dessus de la strate arbustive pourront être conservés sous forme d’arbres têtards après élagage. 

Haie multi-stratifiée protégeant les tunnels de production de légumes

Haie multi-stratifiée protégeant les tunnels de production de légumes

 

Haie multi-stratifiée mature initialement plantée pour l’ombrage et brise vent